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Guillaume APOLLINAIRE – Ses premiers pas comme critique d’art (1902)

Manuscrit autographe signé intitulé LE « PERGAMON » À BERLIN – [c. mars 1902] – 1 p. ½ sur deux feuillets in-folio (17 x 26 cm env.), sur papier de l’Hotel Vier Jahreszeiten de Munich.

 

« Mais que cela est beau ! Quel magnifique poème de pierre. »

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Guillaume APOLLINAIRE (1880 – 1918) – Poète

Manuscrit autographe signé intitulé LE « PERGAMON » À BERLIN – [c. mars 1902] – 1 p. ½ sur deux feuillets in-folio (17 x 26 cm env.), sur papier de l’Hotel Vier Jahreszeiten de Munich.

Ce texte va paraître dans La Revue Blanche du 15 mai 1902 et marquera les débuts d’Apollinaire comme critique d’art. Le 15 mars, la revue avait par ailleurs déjà publié son conte L’Hérésiarque, première œuvre signée « Guillaume Apollinaire ».

Son émerveillement devant la statuaire du Pergamon

« Berlin est une ville affreuse et commode. Tout ce qui tend à lui donner l’aspect d’une capitale est d’un goût détestable. Au reste, n’importe laquelle des villes de l’Empire est plus intéressante que cette cité sans églises. N’étaient les châteaux des environs, quelques tableaux de l’ancien musée, et le Pergamon récemment ouvert, un voyage à Berlin serait inutile. L’édifice appelé Pergamon situé derrière l’ancien musée contient les trouvailles rapportées des fouilles de Pergame et surtout la fameuse gigantomachie qui décorait l’autel du temple de Jupiter. On a reconstitué cet autel et ce travail a demandé vingt-trois ans aux savants berlinois. Mais que cela est beau ! Quel magnifique poème de pierre. Les dieux olympiens terrestres, marins et infernaux, les animaux, les géants, les monstres entremêlent, furieux, leurs membres parfois mutilés, les torses des déesses se cabrent sur les bras des héros, des faces se crispent, des bouches mordent. Cet œuvre, que des artisans sculptèrent dans la pierre de grain très gros, sent tellement sa divinité que le voyageur, oubliant la foule des visiteurs à moustaches en croc et des femmes laides, espère l’heure où mugiront les taureaux des hécatombes. La gigantomachie date de la troisième période hellénique qui s’étend de 33 à 63 av. J.C. À contempler l’œuvre des tailleurs de pierre de Pergame, des hommes deviendront peut-être sculpteurs en Allemagne. Je le souhaite, car vraiment les Allemands n’ont pas idée de ce que c’est que la sculpture. Les épouvantails de la Siegesallee, les œuvres de Begas  ou du plus récent Max Steiner (x) n’ont rien qui puisse changer cette opinion sincère.
(x) : (n’en déplaise à Monsieur Georg Brandes) »

Le poète visite le célèbre musée berlinois au mois de février 1902, alors qu’il accompagne la vicomtesse de Milhau, Elionor Hölterhoff, et sa fille Gabrielle, âgée de 9 ans, dont il est le précepteur. Il séjourne ensuite à Munich pendant 6 semaines à partir du 16 mars, dans une pension de famille, alors que la vicomtesse, sa fille et leur gouvernante anglaise s’installent à l’Hotel Vier Jahreszeiten. Guillaume Apollinaire les accompagne en Rhénanie, sur les terres de la vicomtesse, traverse Stuttgart, Heidelberg, Mayence, Coblence etc. et vivra une relation amoureuse avec la gouvernante, Annie Playden. Celle-ci lui inspirera notamment La Chanson du mal-aimé (1909), poème majeur du recueil Alcools. Son contrat de précepteur prévu pour une année, jusqu’au 21 août, ne sera pas reconduit.

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