Jules RENARD – Jolie lettre à Alfred Natanson évoquant Léon Blum

Jules RENARD (1864 – 1910) – Écrivain et auteur dramatique

Lettre autographe signée adressée à « Mon prince » [Alfred Natanson] – Chaumont par Carligny (Nièvre), 10 avril 1904 – 3 pp. in-12, à l’encre violette, enveloppe conservée, « Monsieur Natanson – 43, rue du Rocher. 43 – Paris »

Intéressante lettre aux implications tant littéraires que politiques

« Enfin nous voilà [casé ?], à mes dépens. Que de démarches louches pour en arriver là ! C’est que je le dis sincèrement. Ah ! si j’espérais avoir pour vous des billets de cirque.
Temps admirable aujourd’hui. S’il continue, il retardera peut-être notre rentrée jusqu’à jeudi. Je suis bien content de Blum mais il sait bien et vous savez bien que je n’ai pas encore ce souci, et que je me pose cette seule question : pourrai-je ? ne pourrai-je pas.
Je n’ai pas touché à mon second acte, mais j’aurai passé ici 15 jours assez excitants […].
Il n’y aura rien pour moi à la Renaissance. Tout a gelé ! Je vous conterai les choses. On va peut-être y prendre l’Anglais tel qu’on le parle [la pièce a succès de Tristan Bernard, créée en 1899 et qui sera reprise au théâtre de l’Athénée le 15 avril]. à vous deux.

Enfin voilà du soleil pour les petits de Descaves »    

Jules Renard évoque ici sa pièce La Bigote qui ne sera représentée que le 21 octobre au théâtre de l’Odéon, la tentative au théâtre de la Renaissance ayant échoué. Le 5 mars, il avait donné lecture du 1^er acte d’Ernestine à Lucien Guitry, alors directeur du théâtre de la Renaissance, qui n’a pas donné suite. La pièce fut rebaptisée Le Beau dimanche, puis Sœur Ernestine, pour devenir finalement La Bigote. Il écrit depuis Chaumont où il se présente aux élections municipales sur une liste républicaine ; il devient maire de Chitry-les-Mines le mois suivant (15 mai). Une de ses premières mesures sera la gratuité des fournitures scolaires. Remarquons également qu’il adresse cette lettre au 43, rue du Rocher et qu’il mourra au 44 !

Ami proche de Jules Renard, le dramaturge Louis-Alfred Natanson (1873-1932) participe avec ses frères Thadée et Alexandre à la fondation de La Revue blanche. Avec Léon Blum, Anatole France et Mirbeau entre autres, les deux amis allaient collaborer au journal L’Humanité dont le premier numéro sort huit jours plus tard.

Bon état, voir photos.