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Paul MORAND – Très belle L.A.S. sur son engagement pendant la guerre (1959)

Lettre autographe signée adressée à son cher ami [Marcel Thiébaut] – Vevey, 14 juin 1959 – 3 pp. in-8 obl.

 

« Je ne regrette rien. Ni mon attitude pendant la guerre, ni mon échec académique »

 

 

Vendu

Paul MORAND (1888 – 1976) – Écrivain et diplomate

Lettre autographe signée adressée à son cher ami [Marcel Thiébaut] – Vevey, 14 juin 1959 – 3 pp. in-8 obl.

Sur son engagement pendant la guerre et sa candidature à l’Académie qui connaît un nouvel échec

« Je vous remercie beaucoup de votre lettre du 9. Très curieux de lire prochainement Cocteau. Vous savez mon peu de goût pour les honneurs et la vie publique ; je ne me suis présenté que pour défendre une certaine tranche de français désarmés et pour obliger, en ce qui me concerne, mes ennemis à s’expliquer, sur le fond. Ni le C.N.E., ni le Quai n’ont rien répondu, lorsque je me suis justifié ; j’ai dit à Genevoix : “J’attends qu’ils ouvrent leur dossier”. J’attends encore. En dehors de tout ce que j’ai dit devant le Conseil d’État, je n’ai trouvé que des calomnies toujours invariantes, dès que jamais contrées et toujours différentes des lettres anonymes (Spitzmuller écrivait aux académiciens : “ne me nommez pas, car je risque un procès en diffamation”) Ce procès, je l’eusse souhaité mais comme il y a plus de dix ans, la loi, dans un but d’apaisement, (?) l’interdit, d’ailleurs.

Je ne regrette rien. Ni mon attitude pendant la guerre, ni mon échec académique. La Conférence de Genève qui se termine n’est qu’une preuve de plus de ce que je vous ai dit souvent. Avoir scié en deux l’Allemagne, notre poutre maîtresse, a condamné l’Europe à mort. Et n’avoir pas profité de la bombe en 45, pour faire reculer les Russes, ces deux fautes là sont de celles qui ne se réparent pas. L’Europe, c’est fini .

Je ne vous enverrai rien sur l’Irlande, car mes notes sont incomplètes et je n’ai pas le temps d’y retourner cet été mais une courte nouvelle, peut-être pour votre numéro de septembre La Force des choses ou le dernier dîner de Cazotte ; son fameux souper est connu, mais apocryphe ; son dernier dîner est une histoire inconnue mais véridique ; j’en ai fait cette nouvelle, qui aura de 15 à 20 pages de revue.

Pour l’Amour et le Voyage, après réflexion, ne comptez pas sur moi. Je n’ai plus le temps ; il me reste juste de quoi vivre et, si j’écris, juste de quoi dire des choses qui m’importent. Si vous avez la bonté de confier ce sujet à un autre écrivain, je pense à Dutourd, qui travaille vite et bien, à Michel Déon, à Claude Martin, à Cécil Saint Laurent.

J’espère que votre santé est bonne. Je vous prie de ne pas oublier que je vous tiens en estime rare et en très grande affection.

[en post-scriptum] La mort de Varende m’a fait une peine affreuse »

De retour à Paris en 1955, Paul Morand obtient sa retraite du Quai d’Orsay puis tente de se présenter à l’Académie française en 1958. Une campagne conduite par François Mauriac, reprenant les anciennes accusations de collaboration, fait toutefois échouer sa candidature au cours d’une séance mémorable, laquelle se termine par une suspension du scrutin. Pierre Benoît, un de ses plus fervents soutiens, indigné de cette décision, quitte l’Académie le même jour et décide de ne plus jamais y siéger.

Il fera une nouvelle tentative en 1959, mais l’annonce du veto formulé par le général de Gaulle le contraindra à se retirer.

Paul Morand devra attendre 1968, lorsque le général de Gaulle consentira à une nouvelle candidature, pour être élu au fauteuil de Maurice Garçon.

 

Bon état, voir photos.