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Anatole FRANCE – Lettre autographe signée adressée à Jules Couët

Lettre autographe signée à Jules Couët – La Béchellerie, Saint-Cyr-sur-Loire, [15 novembre 1917] – 2 pp. ½ in-8, en-tête imprimé à son adresse, enveloppe.

 

« Je ne vous dis rien des événements parce que je ne trouve pas les mots pour m’exprimer et si je les trouvais, ils feraient saigner les oreilles et les cœurs »

 

 

Vendu

Anatole FRANCE (1844 – 1924) – Écrivain et critique littéraire, prix Nobel de littérature 1921

Lettre autographe signée à Jules Couët – La Béchellerie, Saint-Cyr-sur-Loire, [15 novembre 1917] – 2 pp. ½ in-8, en-tête imprimé à son adresse, enveloppe.

Belle lettre évoquant son séjour en Touraine et le conflit en cours

« Nous avons ici un bel été de la Saint-Martin, et il est sage de croire que nous le devons à l’intercession du bienheureux Martin, qui précisément fut évêque de Tours. Mais il a donné à mademoiselle Perfection [diminutif affectueux donné à Emma Laprévotte, femme de chambre de Mme de Caillavet, restée au service de l’écrivain au décès de celle-ci. Elle deviendra son épouse en 1920] des maux de reins et à moi un rhume pour nous punir de n’avoir pas porté d’argent à la basilique. Il est vindicatif et l’on remarque qu’un historien, qui a mis des doutes sur son intelligence, a été tué à la guerre. Beaucoup d’autres ont été tués aussi. Mais je vois dans cette mort d’un impie la main de Saint Martin.

Je n’ai pas lu la pièce déposée à la Comédie, et ne la lirai pas, n’y ayant aucune part. Elle est de madame Marcusse, qu’on m’a dit être fort intelligente. Robert Dell [Robert Dell (1865-1940) est le correspondant en France du Manchester Guardian. Il fut notamment rédacteur en chef de la revue Les Nations, dans laquelle France publia son célèbre article “Pour la liberté”. Ses déclarations en faveur de la paix incitèrent l’écrivain à prendre ses distances avec lui au cours de l’été 1917. Malgré leur rupture, ils restèrent en relation amicale et Anatole France fut le témoin au mariage de sa fille Veronica] est bien celui que vous connaissez. Il s’était chargé de présenter l’ouvrage au public anglais. Je ne sais ce qu’il en est, ayant cessé de le voir.

Il n’y a plus de bornes à ma tristesse et à mon inquiétude. Je ne vous dis rien des événements parce que je ne trouve pas les mots pour m’exprimer et si je les trouvais, ils feraient saigner les oreilles et les cœurs.

Mademoiselle Perfection vous dit mille choses et moi mille, ce qui ne fait que mille en tout, car ce sont les mêmes et toutes de tendresse.

Nous aussi nous avons eu des arbres comme des torches ardentes. Et pour nous aussi maintenant toutes les torches sont éteintes. »

Jules Couët (1860-1938) est nommé bibliothèque-archiviste de la Comédie française en 1908, poste qu’il occupera jusqu’à sa retraite en 1936. Grand ami d’Anatole France qui aura souvent recours à lui pour ses recherches bibliophiliques, il collabore à plusieurs revues dont le Journal des débats, Le Bouquiniste et L’Amateur d’autographes, par des articles humblement signé « un vieux bibliophile » ou « un vieil amateur ». Il publiera également une bibliographie érudite sur Sainte-Beuve. En 1924, il organisera une exposition Anatole France à La Comédie française.

 

Bon état, voir photos.