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F.-V. RASPAIL – Lettre de prison à Antony Thouret également incarcéré (1833)

Lettre autographe signée adressée à Antony Thouret – Paris, Sainte-Pélagie, 29 octobre 1833 – 1 page sur un double feuillet in-12, nom et adresse du destinataire au verso du second feuillet : Monsieur A. Thouret détenu politique à Douai.

 

« Au reste il paraît que vous n’êtes pas plus heureux que moi. Tendons-nous la main : tapez là, mon brave »

 

 

Vendu

François-Vincent RASPAIL (1794 – 1878) – Chimiste, botaniste et homme politique

Lettre autographe signée adressée à Antony Thouret – Paris, Sainte-Pélagie, 29 octobre 1833 – 1 page sur un double feuillet in-12, nom et adresse du destinataire au verso du second feuillet : Monsieur A. Thouret détenu politique à Douai.

Alors qu’il vient de faire paraître son Nouveau système de chimie organique, François-Vincent Raspail est condamné à quinze mois de prison et 500 frs d’amende pour « offense au roi », il écrit depuis sa cellule à son ami Thouret également prisonnier à Douai.

Belle correspondance de prisonnier à prisonnier             

« Je vous réponds un peu tard, mais aussi comment vous aurais-je répondu au milieu du tapage scandaleux dont je viens d’être en prison la cause bien innocente. Quelle prison bon dieu que la nôtre ? Comment la police y a pris pied. Enfin je dois une chandelle à notre Dame, et d’une ! Vous m’avez ravi d’aise par votre bon souvenir, ainsi que par celui de votre excellente épouse. Cela m’a rappelé des moments bien différents de compagnie passée. Je me suis condamné à vivre seul, dans un cabanon de dix pieds avec une fenêtre de dix pouces. Me hissant sur une chaise pour intercepter un peu de soleil, et me trémoussant dans mon gîte, pour ne pas perdre tout à fait l’usage de mes jambes. Au reste il paraît que vous n’êtes pas plus heureux que moi. Tendons-nous la main : tapez là, mon brave. Le messager n’a pas menti dans l’annonce du prix de 10.000 frs. Le président de l’académie des sciences m’a écrit une lettre […] l’académie a persisté dans son dire, mais Guizot s’est fâché et l’académie tremble. Nous verrons le 5 nov. Pour présumer de la distribution. Au reste je tiens la lettre ; elle me vaut mieux que le prix. Adieu mon bon Thouret, nous causerons un peu plus longuement une autre fois. L’ouvrage me presse. Je vous embrasse mon ancien ami et par bécarre et par bémol. »

Après une éphémère carrière d’avocat, Antony Thouret (1807-1871), se consacre à l’écriture et s’engage en politique. Défenseur des idéaux républicains il fonde le journal La Révolution de 1830 et collabore plus tard à La Réforme. Son opposition farouche à la Monarchie de Juillet lui vaut un emprisonnement pour délit de presse à Sainte-Pélagie, qui accueille les prisonniers politiques et où Raspail entrera également pour un séjour de 15 mois en 1832, uni à son ami par le destin dans la défense d’une cause commune. Pendant son incarcération, Raspail, également fondateur d’un journal d’opposition républicaine, Le Réformateur, prendra la tête de l’Association républicaine de défense de la liberté de la presse. Antony Thouret fera d’autres séjours en prison, à Paris, à la Force, puis à Douai, à la prison de Saint-Waast.

 

Marges irrégulières, voir photos.