Gabriele d’ANNUNZIO (1863 – 1938) – Romancier, dramaturge, poète et homme politique
Bel ensemble autour du projet d’adaptation au théâtre de son roman Triomphe de la mort
- Une lettre autographe signée, à son ami et traducteur, Georges Hérelle – Francavilla al mare, 10 juin 1896 – 4 pp. in-8, à son adresse en coin, en italien :
« Mio caro amico. Ho ricevento lo scenario del signor de la Tourrasse, e l’ho lettro con attenzionne.
Mi sembra molto ingegnosamente construito, se bene il carattere d’Ippolita in ispecie di appaja alquanto difformato ; Inoltre qui l’audacia di certe scene. Tollerabile nel romanzo – diventa quasi brutale.
Penso che il signor de la Tourrasse dovra operare prodigi d’ingegno e di abilita per vestire di muscoli vigorosi e per inondare di vivo sangue questo aspro scheletro. Vedremo. Per dare un consenso definitivo, bisognera che io abbia sotto gli occhi il dramma nella sua interezza. Vogliate dunque communicare al signor de la Tourrasse la mia simpatia verso questo suo difficile tentativo che a lui ed a me auguro fortunato.
Vi stringo la mano cordialissimamente. A rivederci ! Il vostro. »
Traduction : Mon cher ami. J’ai reçu le scénario de Monsieur de la Tourrasse, et je l’ai lu avec attention. Il me semble très ingénieusement construit, si bien le personnage d’Hippolyte en particulier paraît quelque peu déformé ; ici l’audace de certaines scènes – tolérable dans le roman – devient presque brutale.
Je pense que Monsieur de la Tourrasse devra faire preuve de merveilles d’esprit et d’habileté pour revêtir ce rude squelette de muscles vigoureux et l’inonder de sang vivant. Nous verrons bien. Pour donner un accord définitif, il faudra que j’aie sous les yeux le drame dans son intégralité. Je vous prie donc de transmettre à Monsieur de la Tourrasse ma sympathie pour cette difficile tentative, pour laquelle je lui souhaite, ainsi qu’à moi-même, une bonne chance. Je vous serre cordialement la main. Au plaisir de vous revoir ! Votre.
- Une lettre autographe signée à Léonel de la Tourrasse – Francavilla al mare, 7 juillet 1896 – 4 pp. in-8, à son adresse en coin, en français :
« Mon cher confrère,
Je rentre à mon ermitage après une absence de quinze jours et j’y trouve votre si aimable lettre. Veuillez donc me pardonner ce retard involontaire à vous répondre et à vous remercier. Tout ce que vous me dîtes au sujet de votre travail est très juste et très subtil.
Il faut rendre bien manifeste, à mon avis, la profonde inconscience de cette femme “terribilis ut castrorum acies ordinata” [réf. Cantique des cantiques : terrible comme une armée rangée en ordre de bataille] qui détruit presque ingénument par une sorte de vertu destructive – toute féminine – qui est un caractère primordial de cette animalité intérieure qu’on ne saurait apprivoiser. Autant Hyppolite est près de la nature, autant George Aurispa en est loin. Il faut rendre manifeste ce contraste dangereux.
Et il faut qu’on sente bien peser sur le drame dès la première scène, le lourd nuage de ce “fatum” moderne d’où découle tout l’élément tragique qui assombrit le roman. Donnez-moi des nouvelles de votre travail. Il faut une main forte et agile pour extraire vivante une œuvre d’art d’une œuvre d’art. La tâche est ardue. Mais soyez sûr que j’attends votre drame avec beaucoup de confiance en votre talent. Agréez, cher Confrère, l’espression cordiale de mes sentiments dévoués. »
- 10 lettres autographes signées de son traducteur Georges Hérelle, adressées à Léonel de la Tourrasse – Bayonne et Paris, 1896-1897 – 27 pp. in-8 et 1 page in-12.
À propos de leur collaboration pour l’adaptation de Triomphe de la mort et du projet d’écriture de L’Ennemie. Les échanges évoquent la rédaction en cours de La Ville morte, dont il assura également la traduction.
Joint : une carte de visite autographe signée de Georges Hérelle (plis) et deux télégrammes expédiés par d’Annunzio à Léonel de la Tourrasse.
Léonel de la Tourrasse (1861-1930) est professeur de littérature française à l’université de Madrid et Conservateur du Musée municipal de Saint-Germain-en-Laye de 1921 jusqu’à sa mort. Il avait proposé à d’Annunzio de transposer son roman Triomphe de la mort en pièce de théâtre, en français, mais le projet semble ne pas avoir abouti. Trionfo della morte, avait été publié en 1894 et traduit par Georges Hérelle en 1896.
Bon état général, voir photos.