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Gertrude STEIN – Rare correspondance pendant son exil en zone libre (1942)

Correspondance de 4 lettres autographes signées adressées à sa chère amie [Thérèse Bonney] – Bilignin (Ain), novembre 1942/janvier 1943 – 9 pp. ½ in-4, sur papier pelure, imprimé au logo « Air France Papier Avion », en français.

 

« Mon livre de Mrs. Reynolds est maintenant fini, je l’ai fini avant-hier, et le livre des enfants to do doit paraître le 15 septembre mais jusqu’ici je n’ai pas eu d’autres nouvelles »

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Gertrude STEIN (1874 – 1946) – Collectionneuse d’art, romancière et poétesse

Correspondance de 4 lettres autographes signées adressées à sa chère amie [Thérèse Bonney] – Bilignin (Ain), novembre 1942/janvier 1943 – 9 pp. ½ in-4, sur papier pelure, imprimé au logo « Air France Papier Avion », en français.

Exceptionnelle correspondance écrite pendant l’occupation, depuis son exil à Bilignin

Gertrude Stein est alors réfugiée avec sa compagne Alice B. Toklas dans à Bilignin (Ain), où elle se consacre à l’écriture de ce qui sera son dernier roman, Mrs. Reynolds, qui relate justement la vie d’une femme en zone libre sous l’occupation. Leur échange témoigne de la complicité des deux femmes et des difficultés à faire éditer l’ouvrage. Pendant cette période Gertrude Stein rédige également Les Guerres que j’ai vues, Le livre de lecture – livre destiné aux enfants, suggéré par son éditeur après le succès de Le Monde est rond – et la traduction d’un discours du maréchal Pétain, à la demande du comité France-Amérique.

Sa correspondante est son amie la photographe d’art et reporter de guerre Thérèse Bonney (1894-1978) avec qui elle échange en français ; la correspondance symétrique de Thérèse Bonney est conservée à la Yale University Library avec une datation fautive de 1945.

L’écriture de Gertrude Stein est difficilement lisible, elle déclarera elle-même à ce sujet : « Je parle mal le français et l’écris encore moins bien, mais c’est la même chose avec Pablo. Il dit que nous écrivons et parlons un français qui n’appartient qu’à nous. »

11 novembre 1942. « Nous étions tellement contentes d’avoir de vos bonnes nouvelles. Non, les photos sont jamais arrivées mais l’article et les reproductions, oui ! et nous étions très touchées, vraiment vous avez parlé de nous et de nos amis avec tellement de bon cœur et de gentillesse [l’article de Thérèse Bonney paru dans Vogue en juillet 1942, intitulé « Gertrude Stein en France »]. Votre lettre est justement arrivée et j’espère que [celle]-ci arrive avant votre départ. Nous avons des moments assez mouvementés [en] ce moment mais notre vie journalière continue d’être la même que vous aviez connue. Nous avons eu le plaisir d’avoir Melle Harvey comme voisine un peu cet été et ça m’a fait grand plaisir. J’ai vu Melle [?] une fois seulement depuis son retour. Elle est comme toujours plongée dans les occupations, nous espérons un de ces jours de la revoir, et vous aussi souvent […]. Mon livre de Mrs. Reynolds est maintenant fini, je l’ai fini avant-hier, et le livre des enfants to do [Livre de lecture, publié en 1944 chez Edmond Charlot, éditeur à Alger] doit paraître le 15 septembre mais jusqu’ici je n’ai pas eu d’autres nouvelles […], alors venez nous voir bientôt et le jeune homme qui était avec vous où est-il […] »

Décembre 1942. « Contente d’avoir de vos nouvelles et ici heureusement nous avons un hiver pas trop rigoureux, pas trop de neige et pas mal de soleil, alors comme ça nous sommes pas mal confortable, même qu’il n’[y] a pas beaucoup de gens dans les chaumières. Je me rappelle quand vous y [étiez], je suis à parler de Mme Reynolds et maintenant enfin elle a paru […] ici elle part pour chez vous à Stockholm parce qu’elle veut vous voir et aussi elle veut voir Cerf. Dîtes-moi si ce voyage s’est bien passé et que vous êtes contente de faire sa connaissance. Tout le monde va bien et les jours passent avec les […] et avec tellement de plaisir. Donnez-nous souvent de vos nouvelles »

29 décembre 1942. « Comme nous étions contentes que Mme Reynolds a fait un si bon voyage [dans sa lettre du 16 décembre Thérèse Bonney lui écrit : « Miracle des miracles, Mme Reynolds est arrivée sans aucune difficulté nulle part »] et votre lettre annonçant son arrivée nous a plu énormément, et maintenant si Cerf ne trouve pas tout à fait à son goût peut-il peut-être faire connaître à Miss Margaret Johnson qui souhaite bien faire sa connaissance, mais j’espère que Cerf […] Notre première jour de neige, Basket [son chien] il a trouvé ça bien agréable mais les autres n’a pas quitté le jeu, tout le monde va à peu près bien, Pee et les autres mais je n’ai pas eu aucune nouvelle de [?], si vous pensez vous pourriez lui demandez de donner de ses nouvelles, sur Kiddie, qui attend des miennes et plus en plus nous sommes contentes des paysages ici qui est tellement agréable alors toute notre amitié, bon Noël et bonne année pour vous et pour tous les vôtres […] »

[Janvier 1943]. « Je me demande êtes-vous encore là, dans tout cas j’espère que vous êtes en bonne santé et que tous mes vœux pour le nouvel an vous [sont] arrivés. Je [ne] peux pas vous dire comme j’étais contente de votre rencontre avec Mme Reynolds, j’espère que vous n’étiez pas désappointée [déçue ?] ni vous ni Cerf, mais comme je disais dans ma dernière lettre dans cette cas elle serait très contente de faire connaissance avec Margaret Johnson. […] Nous avons eu un hiver assez doux, pas beaucoup de neige et cette neige ne dure pas très longtemps […]. Tellement de choses à vous raconter et j’espère que nous nous retrouverons bientôt. Mais dans tous les cas encore tous mes meilleurs vœux pour le nouvel an, tout le monde me joint dans ce souhait, toujours et toujours »

Notons que lorsque Bennett Cerf (1898-1971) reçoit le tapuscrit de Mrs. Reynolds, il fait part de son intention de le publier mais ne le fera jamais, la première édition sera posthume, en 1947 en français (Edmond Charlot) et en 1952 en anglais (Yale Ed.).

Notons également que cette correspondance coïncide précisément avec l’ « opération Anton », déclenchée en novembre 1942, qui se traduit par la disparition de la zone libre et sa conquête par les armées allemandes et italiennes. La première lettre est datée du jour du débarquement des blindés allemands sur les côtes méditerranéennes françaises. Pendant toute la durée du conflit, Gertrude Stein et sa compagne resteront en France ; contraintes de quitter la maison qu’elles occupent à Bilignin, elles seront relogées à Culoz (Ain) dans la demeure nommée « le Colombier », propriété mise à disposition par la baronne Pierlot, proche de Paul Claudel.

Joint : une l.a.s. à un ami, probablement de la même période, évoquant sa visite prochaine, en anglais – 1 page in-4 : « […] we must see you, come to see us, come monday […] »

 

Papier fragile, une marge effrangée, quelques déchirures aux plis, aucun mot manquant, voir photos.