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Hippolyte TAINE – Lettre intéressante évoquant ses idées politiques

Lettre autographe signée – Menton Saint-Bernard (Hte-Savoie), 13 octobre 1877 – 4 pp. in-12, papier de deuil.

 

« Rien de plus difficile à un homme qui porte une redingote de savoir la pensée politique d’un homme qui porte une blouse »

 

 

Réservé

Hippolyte TAINE (1828 – 1893) – Philosophe et historien

Lettre autographe signée Menton Saint-Bernard (Hte-Savoie), 13 octobre 1877 – 4 pp. in-12, papier de deuil.

Belle lettre abordant les idées politiques de Taine

Alors que le premier tome des Origines de la France contemporaine vient de paraître et que le tome suivant est en préparation, Taine exprime ses réflexions sur le suffrage universel.

« Nous allons voter ici demain et je ne sais pas dans quel sens le vote tournera. Rien de plus difficile à un homme qui porte une redingote de savoir la pensée politique d’un homme qui porte une blouse […] Le suffrage universel a cela d’admirable qu’il ressemble au vent : soufflera-t-il demain du sud au nord ? […] Ici les mandements de nos évêques ont fait assez mauvais effet. À mon sens, le fond du paysan, c’est de la défiance signifié par l’imagination ; tout de suite il traduit les raisonnements, les possibilités, les abstractions en légendes vives et colorées […] anecdote, celle-ci absolument authentique, car je connais l’un des interlocuteurs. Au mois de décembre 1870, une dame arrivant de Paris lisait le journal sur le bateau à vapeur qui dessert le lac ; un paysan, assez bien vêtu, s’approche d’elle et lui dit : « Eh bien, Madame, comment cela va-t-il à Paris » – « Pas bien » – « ah, je sais, c’est Napoléon qui a été trahi par ce coquin de Badinguet » – Je ne sais pas comment pensent vos campagnards, ni quelle est leur structure mentale ; pour moi qui ai beaucoup vécu à la campagne et voyagé à pied, leur esprit est toujours la bouteille à l’encre, et le suffrage universel me semble en France un singulier moyen de gouvernement ; peut-être l’an prochain me nommera-t-on conseiller municipal ici. Croyez que si j’accepte ce ne sera point par ambition mais pour voir d’un peu plus près l’état mental du souverain à dix millions de têtes auquel désormais nous appartenons […] »

 

Bon état général, voir photos.