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Juliette DROUET – Émouvante évocation d’une soirée poétique

Belle lettre autographe signée à Victor Hugo, exceptionnelle par son format et son contenu – S.l., 10 juin mercredi après-midi 1h ½ [1840] – 4 pp . grand in-4 (21 x 27 cm).

 

« Comme tout ce monde, Dieux, déesses, héros, rois, reines, femmes, nymphes et enfants ont du se disputer hier les merveilles que vous leur avez jetées à pleine bouche »

 

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Juliette DROUET (1806 – 1883) – Actrice et maîtresse de Victor Hugo

Lettre autographe signée à Victor Hugo, exceptionnelle par son format et son contenu – S.l., 10 juin mercredi après-midi 1h ½ [1840] – 4 pp . grand in-4 (21 x 27 cm).

Très belle lettre amoureuse : Juliette est embrouillée dans ses comptes et évoque un charmant après-dîner poétique avec Toto

« Je t’aime avant toute chose et après toute chose, je t’aime, je t’aime et je t’aime. Je viens d’écrire à la mère Pierceau [sa couturière et amie] que j’enverrai Suzanne [Suzanne Blanchard, sa cuisinière et servante] demain chez elle. Je n’ai pas pensé à te demander la somme juste que tu m’as apportée hier non plus que notre dépense d’hier. Ce sera pour ce soir.

Je me donne beaucoup de mal pour mettre mes dépenses en ordre et à la fin du mois je suis toujours embrouillée et toujours en deça ou en dessous de ma recette. Je fais pourtant de mon mieux mais ça ne suffit pas pour être juste dans mes comptes. Je crois qu’il va faire un gros orage le ciel est noir comme hier et le temps encore plus lourd. Tâche de ne pas te faire mouiller et viens chercher le parapluie avant qu’il ne pleuve à seaux.

Quel charmant après dîner nous avons passé hier. Je voudrais y être encore sous la pluie me mouiller jusqu’aux os jamais je n’oublierai le bassin du Titan, et la charmante tourterelle qui venait s’y désaltérer. Cette rassurante petite bête avait l’air de nous connaître et d’attendre pour boire à petites gorgées que tu aies laissé tomber des gouttes de ta poésie dans ces petites coupes moussues et fleuries qui l’entouraient. Dieu que de perles vous avez égrenées hier, dans ce magnifique jardin, au pied de ces belles déesses que je crois vivantes quand vous les regardez, que de fleurs dans ces parterres remplis d’enfants joyeux. Comme tout ce monde, Dieux, déesses, héros, rois, reines, femmes, nymphes et enfants ont du se disputer hier les merveilles que vous leur avez jetées à pleine bouche, tout autour d’eux. J’avais du regret de m’en aller. J’aurais voulu pouvoir revenir au clair de lune et pouvoir leur reprendre tous ces trésors dont vous êtes si peu avare.

Oh ! je veux y retourner bientôt en même temps nous irons revoir mon Metz où nous avons été si heureux. C’est un pèlerinage qui nous portera bonheur et que j’ai hâte de faire. Je t’aime mon grand Toto. Pardonne-moi ce gribouillage qui me semble ridicule et qui doit l’être, car j’étais ivre d’amour quand je l’ai écrit. Ma pensée chancelle et tombe sur mon papier parce qu’elle a trop bu de mon âme et qu’elle ne sait plus où elle en est. »

Bon état, voir photos.