Léopoldine et Victor HUGO – Précieuse lettre écrite à 4 mains (1834)
Lettre autographe signée écrite à 4 mains par le père et sa fille âgée de 9 ans adressée à Louise Bertin – Paris, 1er juillet 1834 – 3 pp. ½ in-8, dont 2 pp. autographes et signées de Léopoldine et 1 p. ½ autographe de son père, adresse et marques postales.
« Vous savez bien aussi que nous sommes à vous de tout notre cœur. Didine vient de vous le dire avant moi mais je le pensais bien avant elle. »
Vendu
Léopoldine HUGO (1824 – 1843) – Fille aînée de Victor Hugo et d’Adèle Foucher, morte noyée à l’âge de 19 ans
Victor HUGO (1802 – 1885) – Poète et dramaturge
Lettre autographe signée écrite à 4 mains par le père et sa fille âgée de 9 ans adressée à Louise Bertin – Paris, 1er juillet 1834 – 3 pp. ½ in-8, dont 2 pp. autographes et signées de Léopoldine et 1 p. ½ autographe de son père, adresse et marques postales.
Précieuse lettre écrite conjointement par le père et la fille complices
« Ma chère Louise,
Tu t’es bien trompée en croyant que je t’ai oubliée, ce n’est pas ma faute j’ai beaucoup de choses à faire pour les prix car ils n’ont pas encore eu lieu cela sera sur la fin d’Août ou au commencement de septembre et alors nous irons aux Roches quelques jours après. Les prix de mes frères seront le 25 aout, nous allons faire une partie d’ânes jeudi prochain en huit avec mes frères et des messieurs et j’irai à la noce samedi. Toutes les couronnes que j’espère avoir je te les donnerai pour que tu penses à moi quand je ne serai pas avec toi. Tu es bien gentille de m’avoir écrit car je t’assure que j’ai été bien contente quand j’ai reçu la lettre à la fête de papa nous aurons une loterie où il y aura beaucoup de joujoux papa sait bien que c’est sa fête et c’est lui qui nous fera la loterie. Quand tu m’écriras voudras tu me donner des nouvelles des pigeons car je ne les ai pas vus la dernière fois que j’ai été te voir. Dédé est bien gentille mais elle a été un petit peu malade et puis elle me prend toujours ma poupée et toutes mes affaires qu’elle trouve sous ses griffes tu devrais bien écrire à papa qu’il dise à maman d’empêcher Dédé de toucher à mes affaires et surtout à ma poupée. Adieu ma chère Louise, je t’aime de tout mon cœur embrasse pour moi les petits pigeons et dis leur que je les aime bien malgré que je ne les connaisse pas. Toto, Charlot Dédé [ses frères et sœur, François-Victor, Charles et Adèle, âgés respectivement de 5, 7 et 3 ans] et moi nous t’embrassons de tout notre cœur. ton amie Léopoldine Hugo »
Son père continue à sa suite : « Voici, j’espère Mademoiselle, une longue épître de la poupée ! Comment pouvez-vous donc croire que la place Royale [où la famille Hugo avait emménagé en 1832, dans l’hôtel Guémené] vous oublie ! Nous nageons, il est vrai, dans les plaisirs, nous faisons des parties d’eau et des loteries de joujoux mais tout cela ne vaut pas le moindre brin d’herbe des Roches, et je donnerais le plus beau de ces polichinelles pour le plus laid de vos pigeons […] Vous le savez bien n’est-ce pas ? Vous savez bien aussi que nous sommes à vous de tout notre cœur. Didine vient de vous le dire avant moi mais je le pensais bien avant elle. »
Fille aînée de Victor Hugo et d’Adèle Foucher, Léopoldine (1824-1843) est leur deuxième enfant. Son décès tragique par noyade, lors d’une promenade en canot en compagnie de Charles Vacquerie, son mari, aura une influence considérable sur l’œuvre de Victor Hugo et lui inspirera plusieurs poèmes parus dans Les Contemplations (1856), le plus célèbre, À Léopoldine, mais aussi À Villequier et Elle avait pris ce pli. Au moment du drame, l’écrivain se trouve entre l’Espagne et la France, de retour d’un voyage avec Juliette Drouet. Il n’apprendra la mort de sa fille et de son gendre que quatre jours plus tard dans Le Siècle du 9 septembre, alors qu’il se trouve à Rochefort. Accablé, il ne pourra se rendre sur la tombe de sa fille qu’en septembre 1846. Voir également cette autre lettre adressée par Léopoldine à son futur beau-frère.
Poétesse et musicienne, Louise-Angélique Bertin (1805-1877) naît d’un père journaliste – Louis-François Bertin, directeur du Journal des débats – et d’une mère pianiste qui l’initie tôt à la musique. Devenue handicapée suites à une poliomyélite, elle compose plusieurs œuvres (opéras, cantates, compositions pour piano) qui trouvent difficilement la reconnaissance critique. En 1836, avait été créée La Esmeralda, dont Victor Hugo avait écrit le livret adapté de son roman Notre-Dame de Paris (le titre avait été changé en raison de la censure). Berlioz qui en avait dirigé les répétitions, qualifiera l’œuvre de « virile, forte et neuve ».
Sur Hugo et Les Roches. Cet été 1834 est pour la famille Hugo une époque heureuse. Le château des Roches (entre Bièvres et Jouy-en-Josas) est mis à disposition de Victor Hugo par son ami Louis-François Bertin qui en a fait sa retraite estivale. La famille Hugo y fait donc de longs et fréquents séjours depuis 1828, et cette année-là l’écrivain loue à quelques kilomètres une chambre pour Juliette dans une petite maison du hameau des Metz, près de Jouy-en-Josas ; dans le même temps Sainte-Beuve rend discrètement visite à Adèle… Aux Roches, Louise Bertin veille alors sur les enfants ; Léopoldine entretiendra un rapport d’intimité durable avec celle qu’Hugo appelait affectueusement « la seconde mère de ses enfants ».
Un ancien onglet en marge, une déchirure en coin due à l’ouverture, sans atteinte au texte, voir photos.